Réaction à la séparation

Le lien parent-enfant et, plus particulièrement, mère-enfant fait l’objet de nombreuses études. Chez l’animal, l’étude du phénomène de « bonding » (création du lien) a montré l’existence d’une « période sensible », peu après la naissance, qui est cruciale pour la qualité de la relation mère-enfant ultérieure. La qualité de ce lien dépend tant de la mère que de l’enfant, tant de facteurs biologiques (hormonaux, par exemple, avec l’ocytocine) que relationnels (signaux émis par le petit vers sa mère, par exemple).

Chez l’être humain, l’expérience d’une telle « période sensible » est débattue, mais tous s’accordent sur l’importance de favoriser un contact très précoce et de bonne qualité entre la mère et le nouveau-né (le contact physique précoce diminuerait, par exemple, le risque ultérieur de maltraitance !)

La relation parent-enfant, et plus particulièrement mère-enfant, commence avant l’accouchement, parfois même avant la grossesse, dans les fantasmes des parents, avec la représentation d’un « enfant imaginaire ». La relation avec l’enfant réel commence à la naissance avec des échanges à de nombreux niveaux: contact physique, regard, allaitement… La mère est alors dans un état de vigilance et de réceptivité particulière aux signaux émis par le nourrisson (ce que le psychanalyste anglais Donald W. WINNICOTT a appelé la « préoccupation maternelle primaire »).

BOWLBY, psychanalyste anglais, à l’origine de la théorie de l’attachement a décrit les 4 phases du processus de deuil (sidération, languissement, désespoir, intériorisation). Le deuil est une réaction à une perte, donc à une séparation.

Il s’intéresse aux caractéristiques de la relation de l’enfant avec la personne qui s’en
occupe. En particulier, à la mise en place de « l’attachement »

> avant 2 mois : attachement indifférencié
> 2-7 mois : début d’attachement, mais substitution possible
> après 7 mois – attachement sélectif, détresse lors des séparations
> 3-4 ans compréhension du po* int de vue de l’autre (capacité de se « décentrer »,
théorie de l’esprit).

SPITZ et l’hospitalisme (1946)

SPITZ a décrit le comportement d’enfants séparés, dans le deuxième semestre de
leur vie, de leur mère, celle-ci ayant été incarcérée. Ces enfants étaient par ailleurs nourris et soignés correctement.

Il distingue 3 phases:

> 1er mois: Pleurs
> 2ème mois: gémissements plaintifs, cassure de la courbe de poids, arrêt du
développement psychomoteur.
> 3ème mois: refus de contact, enfant couché sur le ventre, diminution du sommeil,
maladies somatiques.

Si l’absence de maternage se poursuit au-delà du 3 ème mois, cet état devient irréversible, réalisant le tableau « d’hospitalisme ».

AINSWORTH et la situation étrange (1967)

Mary AINSWORTH crée une situation expérimentale, la « situation étrange » durant laquelle on observe le bébé d’un an dans une pièce, alors que son parent s’en va, puis revient plusieurs fois pendant 20 minutes. Cette expérience, très étudiée depuis, a permis de discerner des « types d’attachement ».

> Attachement anxieux évitant: semble ignorer le départ et le retour du parent
> Attachement anxieux résistant: anxieux au départ, empressé mais en colère au retour du parent
> Attachement sécurisé: le bébé se montre anxieux au départ du parent mais sollicite le parent à son retour et est rapidement calmé par lui.

(un 4ème type, l’Attachement désorganisé, a été décrit par la suite).

Les expériences sur l’attachement nous montrent deux éléments fondamentaux:
> Ce sont les enfants sécurisés qui sont les plus capables d’explorer le monde extérieur dans un va-et-vient entre la pièce et le parent (balance attachement-exploration). Cela montre l’intérêt d’une base affective stable dans la capacité à investir le monde extérieur.
> Le type d’attachement n’est pas une caractéristique propre de l’enfant. Un enfant peut montrer un type d’attachement avec un parent et un autre avec l’autre. C’est donc dans la relation et non dans l’individu seulement que se situe cette « sécurité ».

À ce propos, BOWLBY, étudiant la phobie scolaire (enfant qui refuse de se séparer du parent pour aller à l’école) distinguait 4 situations
> Enfant qui sécurise le parent
> Enfant qui a peur pour le parent
> Enfant qui a peur pour lui-même
> Parent qui a peur pour l’enfant

(De nombreuses situations sont à mi-chemin entre ces 4 possibilités.)

Autrement dit, la capacité de l’enfant à se séparer de façon supportable se construit en partie sur la façon dont les parents, eux-mêmes, supportent la séparation. Or cela est lié aux expériences précoces des parents, en tant qu’enfants (Voir à ce propos l’annexe sur la théorie de Mélanie KLEIN et l’élaboration de la position dépressive).

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